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  • De Marx à Teilhard de Chardin, de la place pour (presque) tout le monde...
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23 août 2008

Une certaine idée de la France

La France, d'autres nous l'ont dit, n'est jamais aussi grande que lorsqu'elle l'est pour tous les hommes. Elle l'a été parfois: au temps même de la chrétienté dans son élan vers la sainteté, dans la lutte de ses Jacques et de ses communes, dans le permanent témoignage de ses hommes d'arts et de sciences, dans son siècle des Lumières. Elle l'a été par sa Révolution, par les Droits de l'Homme et les soldats de l'An II, par les potentats bousculés à travers l'Europe. Elle l'a été lorsque la liberté guidait le peuple sur les barricades de 1830, lorsque la dignité dressait les canuts de 1832, lorsque le printemps des peuples a éclairé les pavés de 1848. Engels l'appelait alors la terre classique des révolutions. Exemplaire, elle le fut encore par les allumeurs d'espoir massivement fusillés sous la Commune, dans l'immense armée de héros anonymes et abusés, hachés dans la boucherie de la Grande Guerre puis dans l'héroïque armée de l'ombre et les Forces Françaises Libres, protestant pour l'homme contre le pire des fascismes, quand la France la plus grande portait son nom le plus simple: Jean Moulin.

Il est dans notre héritage et notre vocation de dire le droit et de penser dans l'intérêt général du genre humain, comme disait le fils de coutelier Diderot. Sans complaisance ni vanité, sachons rester dignes de nos apports à l'humanité. La magistrature morale d'un Louis IX a éclairé l'Europe. Nous sommes héritiers de Jeanne d'Arc et des Encyclopédistes. Nous avons conduit des assauts renouvelés et sanglants au service de la justice. Saint-Just, pendant la Révolution, déclarait: Nous commencons l'histoire du monde. Goethe, Kant, Fichte, Hegel, parmi tant d'autres, en furent transfigurés. Tous les êtres pensants ont célébré cette époque. Une émotion sublime a régné en ce temps-là, l'enthousiasme de l'esprit a fait frissonner le monde, comme si, à ce moment seulement, on en était arrivé à la véritable réconciliation du divin avec le monde (Hegel, Leçons sur la philosophie de l'histoire). Liberté, Egalité, Fraternité, qui n'a repris ce slogan en quelque lieu de la planète, lors même que nous cessions d'en être dignes ?...

Marx étudiait avec une prédilection spéciale l'histoire de France pour la pureté classique de ses luttes  (Marx). La seule correction qu'il ait jugé nécessaire d'apporter au Manifeste communiste, il la fit en s'inspirant de l'expérience révolutionnaire des Communards parisiens
(Lénine)...

Sans doute ces temps sont lointains, mais leur reflet n'a pas fini d'animer l'espoir des peuples. Un souffle sufit à raviver la flamme. En 1917, on chantait la Marseillaise en Russie. Il arrive qu'on la chante encore, en Chine, en Amérique latine ou ailleurs.

Pour autant nous n'oublions aucune des pages détestables de notre histoire. Nous savons aussi que notre peuple s'affaisse en de périodiques retombées de ferveur. Tantôt au-dessous du niveau commun de l'humanité, tantôt fort au-dessus, disait Tocqueville. A l"èpoque de Louis-Philippe et de Badinguet, Marx se prend à douter des français et s'en détourne. Ce sont des petits-bourgeois chauvins et suffisants, des crapauds. Ils ne sont plus le peuple élu (Marx-Engels, Correspondance). Vint la Commune. Rappelons-nous le sublime mois de mai sanglant, le prolétariat de Paris cerné, isolé, condamné. Cette semaine rouge, écrit Péguy...Ces trente mille morts, trente mille fusillés (Au total, il y eut 107000 victimes). Tandis que les survivants partaient pour l'exil ou le bagne, l'incendie gagnait la Belgique, la Hollande, le Danemark, l'Espagne, l'Itale, la Bohême. Et l'hymne éclatant du communard Eugène Pottier, l' Internationale, devenait celui de tous les opprimés de la terre...
Il y eut encore de grandes grèves sabrées, les mutins de la Mer Noire, l'élan résolu et joyeux du Front Populaire, les Brigades d'Espagne avant les poteaux d'exécution et les camps: au fond de la douleur immensément renaît la gloire (Aragon, La Diane Française). Le peuple français ne reste jamais longtemps couché.

Extrait du livre de Jacques Barros, Marxisme horizon indépassable, L'Harmattan, 1992, pp162-164

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Commentaires
A
Merci de votre commentaire. Vos "hypothèses" sont bonnes. Nous partageons sans doute des préoccupations trés voisines, l'amour est un acte révolutionnaire, pas la haine, pas le nationalisme. Ce que j'aime dans la France c'est ce qu'elle a eu et ce qu'elle peut avoir encore d'universel: le citoyen français est pour moi citoyen de la terre. Le révolutionnaire français n'est pas le prophète armé qui tel Bonaparte se lance à la conquête de l'Europe ou tel Jules Ferry rêve de "civiliser" le monde, le révolutionnaire français accueille l'étranger et le différent comme la Commune de Paris avait su le faire et plus tard la résistance avec les FTP-MOI (ceux de "L'affiche rouge" !) par exemple. Je vous invite à lire sur ce blog l'article suivant sur la mystification de l'idée de nation: http://alainindependant.canalblog.com/archives/2009/12/02/16014115.html
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H
J'ai beaucoup aimé l'article, mais ces derniers temps je me pose la question : puisque nous nous faisons des illusions sur tout, est-ce que la nation existe ? est-ce que la france existe ? est-ce que ce n'est pas une interprétation que nous avons des évènements ? <br /> <br /> En 1977 le préfet demande aux entreprises de s'assurer que chaque salarié connaît bien la caserne qu'il devra rejoindre en cas de conflit.(nous sommes en pleine guerre froide) et à ma stupéfaction, tous les hommes de l'entreprise sauf 2(700 - 2 = 698) m'ont répondu, chacun qu'il quitterait le territoire avec femme et enfants (+ belle-mère éventuellement). J'ai bien dû me rendre à l'évidence ! <br /> <br /> La nation est une fable historique. Est-ce qu'il existe quelque chose qui fait lien ? Peut-être le découvrirons-nous à travers l'épreuve ? <br /> <br /> Concernant l'europe, je crois qu'il y a une sensibilité européenne. je l'ai constaté aux USA quand les réactions des sud-américains, des états-uniens- des australiens, des asiatiques étaient tellement dissemblable à la nôtre. Nous avons besoin d'un certain type de paysage, de vieilles pierres, de musique exprimant quelque chose du pays. L'histoire a réellement forgé un environnement qui fleure la culture.<br /> <br /> Je serai très heureuse d'apprendre que la F. résiste à l'esprit du temps que je trouve médiocre, vaniteux, stupide même, mais je ne veux certainement pas voir le sang coulé. Je crois qu'il est temps d'exprimer la tendresse, la sollicitude, la douceur à tous ces souffrants, ces humiliés, méprisés, exclus. Oui, je préfère veiller sur les vivants plutôt que sur des structures, des entités. Mais l'Etat a fait le mauvais choix ! j'ai bien demandé à être rayé de la nationalité française, le juge aux affaires familiales m'a répondu "impossible, vous êtes d'origine contrôlée. De plus l'article 15 des "droits humains stipule que "Tout individu a droit à une nationalité" donc je ne peut vous retirer la nationalité française.<br /> <br /> Pour les juges, le droit est leur outil de travail. Ils ne peuvent imaginer qu'on puisse souhaiter s'en déssaisir tellement on a honte de voir l'Etat si peu à la hauteur de la situation. C'était en 2003(?)
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