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9 avril 2010

Le voile à l'école ? Réflexion citoyenne (Belgique)

Le voile à l’école ? Une réflexion citoyenne

 

(à propos de « Antigone voilée » de François Ost publié aux éd. De Boeck.)

 

 

François Ost, juriste, philosophe et écrivain belge né à Bruxelles en 1952, vient de réécrire l’histoire d’Antigone sous le titre Antigone voilée. Vingt-cinq siècles après, le texte de Sophocle résiste parfaitement à cette implantation du mythe grec dans l’Europe d’aujourd’hui. Antigone s’appelle Aïcha et sa sœur, Yasmina. Leurs parents sont morts, victimes d’une tragédie effroyable. Leurs frères Hassan et Nordin viennent de s’entretuer en faisant exploser accidentellement une grenade. Personne ne peut dire comment c’est arrivé.

 

La structure qui réglemente aujourd’hui la conduite de ces orphelins, c’est l’école. La direction de l’école prend des mesures absurdes, décrétant que nul ne peut assister à l’enterrement de Nordin, déclaré coupable sans aucune forme de procès. Aïcha se révolte : elle tient tête au directeur de l’école. Partout dans le lycée, elle affiche des photocopies d’une photo de son frère, dresse un autel avec des fleurs et, ultime provocation, elle décide de porter désormais le foulard : la direction de l’école prévoit le renvoi immédiat de toute personne qui porte des signes religieux, y compris le foulard islamique. Le combat entre Aïcha et le directeur de l’école qui a inventé ce règlement interne absurde (aucune loi du pays ne justifie alors cette décision) vaut celui qui opposait Antigone et Créon.

 

Aïcha prend position, clame et revendique. Au-delà de cette histoire, ce sont toutes les questions liées à la polémique du foulard à l’école qui sont posées. Le droit à la liberté d’expression, le respect de la laïcité, la liberté et l’émancipation féminine, la médiatisation à outrance, l’aveuglement de certains règlements, la limite entre droit privé et droit public…

 

Reprenons à titre d’exemple, les propos du journaliste des p.91 et 92 :

 

« Tout ceci ne manque pas de poser, à un niveau plus général, la question de l’adoption d’une loi, qui règlerait, pour l’ensemble des établissements scolaires, cette délicate question du port des signes politiques et religieux (cf. sur ce blog, notre article « Fait religieux, laïcité, neutralité et interculturalité »). Mais, sur ce point, le moins qu’on puisse dire, est que les esprits demeurent divisés à l’heure où d’aucuns réclament la tenue d’Etats généraux du Service public de l’enseignement. Du côté de l’Union nationale des préfets et directeurs d’école, guère d’hésitation : une forte majorité se prononce en faveur de l’option réglementaire. La situation actuelle est la plus insatisfaisante qui soit, explique son Président : certains établissements sont plus laxistes que d’autres, de sorte que la Constitution ne s’applique pas de façon uniforme sur tout le territoire national.

 

En revanche, à la Fédération unitaire des enseignants, dont la base semble très divisée, c’est la plus grande prudence qui prévaut. S’exprimant à titre personnel, son Secrétaire général faisait valoir qu’en tout état de cause, si mesure réglementaire il devait y avoir, celle-ci devrait revêtir une portée pédagogique plutôt que dogmatique. Il note aussi que si l’on devait interdire le port des signes religieux et politiques, il faudrait songer à interdire également le port des marques. A l’heure actuelle, explique ce professeur d’un grand collège de banlieue, nos étudiants sont parfois transformés, sans même en être conscients, en hommes ou femmes sandwichs au profit de grandes entreprises commerciales.

 

       Enfin, à noter encore la position tranchée de l’Union nationale des enseignants du secondaire, farouchement opposée au vote d’une loi. Sous couvert d’interdiction de tous les signes religieux, on sait bien, explique son porte-parole, qu’il s’agirait d’une loi anti-voile. Ce qui ne manquerait pas de stigmatiser une population bien déterminée. Une telle loi n’atteindrait donc pas son but, et serait à l’origine de toutes sortes d’effets pervers, tel la déscolarisation de certains élèves et la création d’écoles-ghettos. Il suffirait, toujours selon cette source, de renforcer les textes existants pour rappeler fermement l’obligation d’assister à tous les cours, y compris l’éducation physique, et ce , tous les jours de la semaine dans le respect du principe de mixité. Et de conclure que la question urgente n’est pas de s’en prendre à une population déjà fragilisée, mais d’accorder plus de moyens aux écoles de première ligne.

 

    Affaire à suivre. »

 

François Ost ne reste donc pas neutre dans ses propos. Il dénonce notamment l’association « voile = terrorisme » que de nombreux médias, relayés par des foules apeurées devant la montée des extrémismes, ont tendance à prononcer. L’ouvrage, publié aux éditions De Boeck en 2010, est accompagné d’un dossier qui aide à comprendre les enjeux de la place des signes religieux à l’école.

Luc Collès

 

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