Questions auxquelles il ne faut pas se défiler

En suggérant de remplacer le défilé militaire du 14 juillet par un défilé civil, Eva Joly a soulevé - sans le vouloir ? - , par cette fausse (fausse car le défilé est un aspect secondaire dans cette affaire) bonne proposition, de vraies questions: comment la France peut-elle assurer sa défense, l'armée professionnelle (jointe à la dissuasion nucléaire) est-elle la seule solution, ou ne faut-il pas sous des formes à réinventer réintroduire la conscription, c'est-à-dire la participation concrète du peuple à l'effort de défense, quelles sont les missions intérieures et extérieures de l'armée ? Ces questions ne sont jamais débattues, pourquoi ? Ne serait-ce pas en définitive parce que poser le problème de la défense, c'est d'abord se demander collectivement ce que l'on a à défendre ? La France de Sarkozy-Fillon, qui fait le tri entre les Français ("de souche" et d'origine étrangère, riches et pauvres,...)  qui maintient une action notamment militaire de type colonialiste en Afrique (Côte d'Ivoire, Lybie, récemment), qui met l'armée au service de l'Empire (Afghanistan,...), ne veut pas de ce débat car à part quelques potentats de la finance et des affaires personne n'est prêt à défendre cette France-là. Si bien que poser les questions des buts de la défense c'est poser la question fondamentale du type de société que nous voulons, que nous serions prêts à défendre personnellement. Voilà pourquoi ILS (et dans ce "ils" que la gauche bien-pensante se sente aussi visée !) ne pardonneront pas à Eva: joli !...

Comments

[pascal]

voila le defilé est la seule marque du 14 juillet un spectacle fort cher et peut etre ala hauteur des democratie comme la corée du nord avec nico de grande democratie noue ont vu défilé la syrie et les different potanta africain ne pas oublie que eva vient d'un pays quiattribut le prix nobel de la paix seul prix nobel qui n'est pas attribué par la suéde pays colonisateur de la norvége merci eva car tu apporte des idees neuve grace atoi on a peut etre vu que nos politique sont corromput

[lanterne diogène]

Cher ami blogueur,

Je lis avec satisfaction ta chronique car elle pose de nombreuses questions. Je me permets d'apporter quelques modestes pistes de réflexion :

http://lanternediogene.canalblog.com/archives/2011/07/16/21627838.html

j'ai rajouté une liste de liens actifs abordant les questions autour du fameux défilé du 14 juillet notamment celui de cette année.

D'abord, qu'il me soit permis de remarquer que c'est la première fois qu'on fait autant de foin sur le sujet. En effet, tous les ans, des voix s'élèvent pour protester contre la récupération de la fête nationale par la seule armée. Certains ont rappelé qu'après l'arrivée de la gauche au pouvoir après 1981, des cadres socialistes et de nombreux citoyens réclamaient la suppression du coûteux défilé militaire avec transports des troupes et défilé de lourds blindés (nous étions peu après les chocs pétroliers) au profit d'une exhibition des réalisations de l'année, notamment en matière scientifique où la France est loin d'être ridicule. La gauche a préféré botter en touche et la droite n'y a jamais prêté la moindre attention. Seulement, cette année, avec une majorité aux abois, il fallait réagir. Ne faut-il pas y voir une tentative de la majorité droitiste pour se redorer un blason singulièrement terni lors de défilés précédents quand des dictateurs notoires étaient invités et passaient, de fait, nos troupes, payées avec nos impôts, en revue ?

Pas plus tard que ce matin, M. Bertrand ironisait sur la gauche et les écologistes qui, d'après lui, faisaient la course en vue de l'élection présidentielle. Je lui répondrai (même s'il ne lit pas nos blogs mais ses fidèles les lisent) que, de toute évidence, c'est plutôt la majorité qui ne sait pas quoi faire pour éviter une alternance politique. En répondant à Mme Joly, en insistant sur ses origines étrangères, le Premier Ministre et sa majorité ont trouvé là une diversion bien commode. D'autant plus qu'ils se gardent bien de répondre aux questions de fond. Ces questions concernent la mission des militaires français en Afghanistan et la représentation de l'armée dans la société.

Il semble également que la droite se range derrière la pratique selon laquelle il y a des choses qu'on n'a pas le droit de dire. Habituellement, c'est une certaine gauche qui monte au créneau et interdit l'expression quand elle ne lui convient pas. La droite n'entend pas demeurer en reste et discrédite l'expression inconvenable. Elle cherche, également des éléments visant à interdire des voix avec des critères tout aussi détestables. Dans ce cas, c'est la double nationalité de l'impétrante qui la rend inapte à s'exprimer sur certains sujets. Dans ces conditions, l'idée même de débat tend à disparaître au profit d'invocations et d'énoncé de dogmes indiscutables.

Pour revenir à l'anecdote, à savoir la pertinence d'un défilé militaire le jour de la fête nationale, je rappelle aux amateurs de belles parades que dans la plupart des pays où cette pratique subsiste, il existe un « jour des forces armées » qui est distinct du jour de la fête nationale. Ainsi, les citoyens de ces pays peuvent, le jour de la fête nationale, consacrer leur pensée à l'idée qu'ils se font de leur pays et à la pertinence de se réjouir ou non d'y vivre. En France, la fête nationale est pervertie par le rendez-vous avec le défilé militaire au point qu'on en oublie totalement la nation, la patrie, ses valeurs et ses symboles.

Au cours d'une conférence de presse, le général De Gaulle comprenait qu'on puisse éprouver la nostalgie de la marine à voile et des grands équipages mais qu'il fallait pourtant moderniser l'armée française. Or, les parades militaires sont apparues au temps de la marine à voile. Elles auraient dû disparaître en même temps.

Maintenant, je me permets de ne pas être d'accord avec l'appel au retour à la conscription. Pour avoir accompli mon service militaire, j'affirme qu'il était tout à fait inutile tant sur le plan de l'entrainement militaire que sur le plan de l'engagement citoyen dans la défense de la patrie.

Le service militaire était une année où l'on perdait toute retenue sociale, où les plus bas instincts refaisaient surface. Nous étions insultés en permanence, bafoués, humiliés. Un gradé ne pouvait s'adresser à un appelé sans gueuler, sans employer de gros mots. Les deux ou trois mois de classe passaient à apprendre à défiler au pas avec un fusil sur l'épaule et des brodequins inconfortables aux pieds. Est-ce cela « la participation concrète du peuple à l'effort de défense » ?

L'entrainement militaire n'était qu'une débauche de carburant et une dépense d'énergie physique sans aucune finalité. Tout semblait avoir pour seul but la soumission à des ordres. Cette soumission était d'autant plus forte quand les ordres étaient absurdes.

On avait surtout l'impression que les générations d'avant avaient trouvé dans la conscription le moyen de faire payer aux jeunes le fait d'être nés dans un monde apaisé. Pour leur rappeler que leurs parents avait souffert de la guerre, il fallait les transporter en camions à ridelle, leur faire porter des brodequins qui blessaient les pieds, des sacs à dos avec une barre de fer qui appuyait au niveau des lombaires, les loger dans des casernements où il n'y avait pas de douche pour tout le monde, leur faire vider les poubelles des grandes villes en cas de grèves d'éboueurs.

Quant à l'engagement citoyen, il n'avait simplement pas sa place dans ce contexte. D'abord, quand on est jeune, on se soucie peu du pays et l'on ne pense pas à la guerre comme on ne pense pas à la maladie ni à la mort. Ensuite, les jeunes trouvent tout naturel de vivre dans le monde où ils se trouvent et pensent, au contraire qu'on n'en fait jamais assez pour leur confort. Ils ne pensent pas que le monde où ils évoluent a été façonné par les efforts de leurs ainés. Ils pensent au contraire qu'il en a toujours été ainsi tant les progrès dont ils bénéficient leur paraissent naturels. Il ne leur vient pas à l'idée qu'il faut contribuer à un effort national à l'âge où l'on renâcle à l'effort. Tout cela est tout à fait normal mais il faut en tenir compte et ne pas rêver d'une jeunesse qui accepterait avec fougue qu'on lui donne des leçons.
Lorsque j'évoquais l'antimilitarisme, le pacifisme, je me rendais compte que mes camarades ne me suivaient pas du tout. Pour eux, il fallait l'armée pour les défendre, ils n'étaient pas loin d'approuver le service militaire. La seule chose qui les dérangeaient, c'était de devoir l'accomplir eux. D'ailleurs, lorsqu'ils approchaient du terme, ils se réjouissaient de savoir que leurs copains plus jeunes étaient appelés à leur tour et « en chieraient » eux aussi. Je ne pense pas que cette mentalité soit de nature à impliquer davantage les citoyens dans la défense du pays ; au contraire.

Parfois, on nous passait des films de propagande afin de nous montrer les missions nobles effectuées par l'armée, souvent à l'étranger ou loin de la métropole. Seulement, il y avait un tel décalage avec ce que nous vivions que ça ne faisait que renforcer le dégoût et l'amertume. Rien n'était fait pour nous faire apprécier cette année passée avec des camarades venus de milieux dont nous ignorions tout. Pire, rien n'était fait pour nous faire aimer quelque peu l'armée au service de tous. Le petit garçon qui sommeille en tout homme ne pouvait même pas rêver quelque peu en utilisant des armes et du matériel obsolètes puisque l'équipement moderne était réservé aux militaires professionnels, ceux-là même qui étaient envoyés en opération. C'était tout à fait contre productif.

Je n'évoque même pas les conséquences personnelles de cette année et qui étaient généralement la perte de la petite amie, la dépression qu'on soignait par l'alcool abondant et bon marché dans les foyers de garnison, la dépendance au tabac (les cigarettes de « vente restreinte » étaient gratuites et les autres moins chères), les maladies courantes mal soignées au point d'en conserver des séquelles plus ou moins graves toute sa vie.

Le service militaire aurait pu être utile et même accepté s'il avait consisté en une préparation physique efficace pour endurer les marches forcées, parcours du combattant et autres épreuves, s'il y avait eu de véritables entrainements au tir avec des armes précises. On aurait pu également utiliser des pédagogues pour faire passer l'idée de défense nationale. Mais non, de toute évidence, ce n'était pas le but.

Comme d'habitude, la France faisait exception dans les pays démocratiques qui nous entourent. Je ne sache pas que nos voisins soient moins bons citoyens du fait que leur armée est professionnalisée et depuis longtemps.

Pour conclure, j'insisterai sur la nécessité de rappeler qu'être militaire, ce n'est pas un boulot comme un autre effectué en uniforme. C'est une tâche où l'on risque sa vie. Être militaire, ce n'est pas faire des acrobaties devant les Parisiens et les touristes de passage, ce n'est pas défiler au pas entre l'obélisque et l'arc de triomphe. C'est porter une arme pour tuer et risquer d'être tué. C'est défendre avec son arme ceux d'entre nous qui sont incapables de se défendre. Enfin, il faut rappeler que les militaires, dans un pays démocratique, ne font qu'obéir aux ordres de missions guerrières décidés par les civils, c'est à dire par nous-mêmes, par l'intermédiaire de nos élus. Surtout, quand on passé l'âge d'être mobilisé, il faut se garder de penser que les plus jeunes doivent y aller et, pour faire avaler la pilule, dire que c'est leur devoir.

[baillergeau]

La présentation des guerres est tellement manipulée que l’on est parvenu à faire croire à tous que l’action militaire pouvait être assimilée à des activités normalement présentables.

La guerre est toujours et partout un bordel fou où le collatéral est toujours supérieur à la cible.

La fonction militaire ne devrait être soumise à des impératifs commerciaux déterminants, mais dépendre d’un pouvoir politique qui aujourd’hui ne devrait plus être à la taille du pays mais de l’UE, or ce pouvoir n’existe pas !!!

Toutes les actions militaires depuis 39/45 ont été des erreurs, même si certaines ont semblé nécessaires aux meilleurs d’entre nous.