Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
A l'indépendant
Publicité
  • De Marx à Teilhard de Chardin, de la place pour (presque) tout le monde...
Newsletter
Archives
Visiteurs
Depuis la création 420 671
29 août 2011

Les faussaires

 
 

bonifaceintellectuels fausaires

Le dernier livre de Pascal Boniface, directeur de l'Institut des relations internationales et stratégiques (Iris) Les Intellectuels faussaires », s'est déjà vendu à plus de 50 000 exemplaires. Il se place en numéro deux des ventes à la Fnac et dans le top 10 de L'Express. Pas rien pour un essai qui a essuyé quatorze refus d'éditeurs. Mais qu'y a-t-il dans cet essai à tendance pamphlétaire qui gêne autant le Tout-Paris ?

En presse écrite, les critiques se comptent sur les doigts d'une main. On dénombre péniblement trois articles, l'un dans Télérama, l'autre dans le Canard enchaîné et enfin un papier dans la rubrique "Le livre du jour" du Monde.

Aucun article dans les hebdos, idem pour Libération et Le Figaro. Les rares critiques ne sont pas dithyrambiques. L'expression « veine pamphlétaire » dans l'article du Monde considérant que cet exercice de style en « constitue la principale limite ».

Rappelons ce qu'est un pamphlet : un texte court et virulent qui remet en cause l'ordre établi. C'est précisément l'idée ouvertement affichée par cet essai. L'essence du discours pamphlétaire tient d'ailleurs du fait que son auteur a l'impression de détenir à lui seul la vérité.

Ici, Pascal Boniface s'érige effectivement au rang d'intellectuel honnête, seul sur sa barque, naviguant au gré du bon vouloir des médias.


BHL, « seigneur et maître des faussaires »

L'idée n'est pas nouvelle : le pamphlet s'attaque traditionnellement au pouvoir en place. C'est la fameuse maxime : « Les politiques, tous des pourris. » Il suffit de remplacer le terme « politiques » par « intellectuels » et l'on obtient le principe de base de ce livre.

Selon le politologue, les intellectuels les plus en vogue dans les médias sont aussi les plus corrompus et les plus démagos. Ils enfument leur public avec habileté, portés par une connivence journalistique qui leur permet de continuer librement leur tour de passe-passe sans se faire prendre.

Boniface classe les plus grands intellectuels faussaires du XXIe siècle, qu'il appelle aussi « beaux parleurs ». Par ordre d'importance :
* Alexandre Adler,
* Caroline Fourest,
* Mohamed Sifaoui,
* Thérèse Delpech,
* Frédéric Encel,
* François Heisbourg,
* Philippe Val,
* BHL, qu'il qualifie de « seigneur et maître des faussaires ».


Condamnation de l'islam au nom de la laïcité

Ils sont tous, écrit-il, des exemples criants de cette manipulation de l'élite intellectuelle française qui a « pignon sur écran ». Leurs dérives déontologiques ne semblent pas les inquiéter outre mesure, car ils portent un message commun qui en arrange plus d'un : celui des chevaliers de la laïcité (et par conséquent de la condamnation de l'islam en France) et de la défense du plus faible (Israël).

Serge Halimi, écrivain et journaliste, avait déjà écrit dans « Les Nouveaux Chiens de garde » les liens douteux entre journalistes et hommes politiques. Et de révéler à la lumière du jour l'existence « d'un petit groupe de journalistes omniprésents » et « d'intervenant permanents » qui dictent l'opinion.

Tout comme Halimi, dont le livre fut largement déligitimé par la presse, Pascal Boniface est attaqué par ceux qu'il qualifie de « faussaires ».

On pourra rétorquer que ceci participe de la liberté d'expression. Personne n'est forcé de croire leurs bonnes paroles et chacun se doit de porter un regard critique sur le monde qui nous entoure.

Soit, mais laisse-t-on un espace médiatique pour une parole qui s'écarterait de la « mainstream » ? D'ailleurs, quel est ce « mainstream » que le directeur de l'Iris s'emploie à dénoncer ?


Peut-on être intellectuel et médiatique ?

Le mérite de cet essai est de soulever une question majeure tirée d'une observation méticuleuse des intellectuels français : est-il possible d'être à la fois intellectuel et de jouer le jeu des médias ?

En d'autres termes, les médias auraient le même effet que le pouvoir sur les politiques : une fois qu'on y a goûté, on ne peut plus s'en passer, et on est prêt à tout pour en avoir encore un peu plus, quitte à manipuler la vérité afin de rentrer dans un consensus politico-moral.

Comme le souligne Boniface qui note l'apparition intempestive de ces néoclercs dans les médias, « le temps réservé à se montrer n'empiète-t-il pas sur celui passé à réfléchir ? ».

Connaissant très bien le monde du petit écran pour en faire partie, souvent invité aux émissions politiques qui traitent du conflit israélo-palestinien, ou de la politique américaine au Moyen-Orient, il propose de décrire les mécanismes de cet exercice périlleux de l'intérieur.

Selon lui, au vu et au su des téléspectateurs, lecteurs, auditeurs et internautes, ces intellectuels qui se veulent irréprochables déforment la réalité avec doigté pour servir leurs intérêts propres. En définitive, ils se comportent comme les Etats-nations qui cherchent dans toute interaction avec un autre Etat leurs avantages premiers.


Le « fascislamisme » au cœur de leurs préoccupations

Boniface dénonce l'apparition médiatique d'un terme aux associations qu'il juge frauduleuses et qui est largement pratiquée par ces intellectuels, BHL en tête : l'amalgame entre islam et fascisme.

Il existerait donc dans le paysage intellectuel français un « ennemi commun ». C'est l'islam radical, par opposition à un islam « modéré ».

Ainsi BHL écrit dans « La Pureté dangereuse » que « l'islamisme n'est que la troisième modalité d'un dispositif dont le communisme et le nazisme avaient été les précédentes versions ».


« Des produits intellectuellement frelatés et toxiques »

Encore une fois explique Boniface, il s'agit de servir ses intérêts personnels qui, depuis le 11 Septembre, sont la justification de la guerre préventive, rebaptisée « guerre juste » par nos chers intellectuels, afin d'annuler le principe de non-ingérence, comme ce fut le cas lors de la guerre en Irak de 2003, ou plus récemment l'intervention de l'ONU en Libye.

Comment ne pas adhérer à ce genre de messages moraux qui prônent l'aide à la libération des peuples sous le joug de dictateurs sanguinaires ? Toutes personnes allant à l'encontre de tels principes humanistes seraient aussitôt brulées sur la place publique.

En d'autres termes, souligne Pascal Boniface :

« Au lieu de permettre au citoyen de réfléchir à des phénomènes complexes, on simplifie à l'extrême, on fournit à l'opinion publique des produits intellectuellement frelatés et toxiques et on fabrique des leurres idéologiques. »

Hela Khamarou

Publicité
Publicité
Commentaires
L
- La critique de Boniface part d'un très mauvais principe : l'idéalisation de la culture. C'est ce qui l'empêche de voir que les médias sont désormais le moyen de propagande, le vecteur culturel le mieux adapté à l'organisation morale et politique de la France, et qu'ils se sont imposés contre la culture traditionnelle républicaine pour cette raison.<br /> BHL & Cie sont juste des phénomènes de foire, pas la cause du problème, bel et bien la culture elle-même, son imperméabilité à l'esprit critique, jusqu'à l'équation parfaite entre la culture et l'argent.<br /> - La meilleure preuve en est que la culture républicaine traditionnelle repose presque entièrement sur la rhétorique et le sophisme, auxquels elle fait le meilleur accueil : Platon et toute la clique des néoplatoniciens boches qui expliquent que le sens des paroles importe peu, pourvu qu'on emporte le morceau dans les débats. Stratégie que les publicitaires appliquent à la lettre.<br /> - Quoi qu'il en soit, on ne peut pas triompher d'une culture mieux adaptée à l'aide de l'ancienne. Il vaut mieux se tourner vers l'internet, nouvelle "contre-culture" a priori, sauf que beaucoup dénoncent sa contre-productivité économique. On peut prendre cet avis comme de bon augure, étant donné que la culture n'a jamais eu d'autre fonction que celle de l'eau bénite ou l'encens.
Répondre
P
tres bon livre a lire le special marianne sur leterrorisme mais vu que du coté gauche oublie duterrorisme de droite pas oas pas amerique du sud gladio et thérése delpech quine voit que ce quelle veut voir pensez en norvege on a parlé islamisme pas de chance c'etait l'ultra droite dommage madame a quant votre prochain essais
Répondre
L
Boniface oublie d'accuser la principale cause de l'intellectualisme en France : l'Education nationale.<br /> Il ne répond donc pas à la question : comment une élite médiatique, dont le mobile est essentiellement publicitaire et passe par les moyens rhétoriques les plus grossiers incarnés par BHL (l'affaire Sakineh, l'exposition de sa compagne dans un cabaret au nom du féminisme, etc.), comment l'élite républicaine et sa prétention d'inculquer l'esprit critique a été dépossédée de ses prérogatives "éthiques" ?<br /> Je préfère donc prendre Lionel Jospin comme exemple de représentant d'une élite abrutie : tout en prônant l'évolution des moeurs et l'adaptation du code civil à ce genre de mutation, il n'a pas vu que ce genre de métamorphoses est celui qui conduit inexorablement un clergé ou une élite à péricliter. Si Jospin n'était pas athée, on pourrait le comparer à J.-J. Rousseau, mais un Rousseau qui n'aurait absolument pas tenu compte des deux derniers siècles écoulés. C'est un des rares points où l'observation de Nitche est juste, ce qui explique sans doute qu'un prêcheur comme M. Onfray l'occulte : la mécanique morale réactionnaire va toujours dans le sens de la dissolution.
Répondre
Publicité