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11 octobre 2011

Tunisie: entre nouveau et continuité (du colonialisme)

Créer des perspectives politiques nouvelles pour un modèle économique social et culturel nouveau ou accepter les chevaux de Troie et la continuité du colonialisme

Le marketing politique des écoles états-uniennes de la « démocratie », Anonymous, NED et Freedom House, et autres officines-paravents de l’administration fédérale, propose au peuple tunisien et à sa jeunesse une centaine de partis dont la moitié provient du RCD. Avant et après le 14 Janvier, les partis de la dictature sont allés mendier leur acceptation et faire leur allégeance à Washington, Londres et Paris et auprès de l’internationale socialiste, déconsidérés par des dizaines d’années de complicités avec Bourguiba, Ben Ali et des groupes d’influence étrangers. Pour ces trois capitales, il faut comprendre ici le système politico-militaire de l’Otan allié aux monarchies arabes, le peuple n’a d’autre choix qu’accepter de se soumettre aux bienfaits du libéralisme sauvage et à la politique de normalisation avec l’entité sioniste.

Depuis déjà plusieurs années, l’on assiste à cette alliance stratégique et effective entre les évangélistes fondamentalistes américains et leurs disciples européens, les élites dominantes dans le monde arabe et musulman et le mouvement sioniste international, pour la sauvegarde de leurs intérêts économiques communs, leurs pouvoirs et la mise en place de leur projet de la gouvernance du monde par la terreur militaire, économique et idéologique. La classe politique tunisienne actuelle n’a pas de projet de société que celui de persister dans les schémas de développement importés alors que la Tunisie a connu depuis 1956 deux « modèles de développement », une collectivisation dictatoriale et un capitalisme sauvage, qui ont mené le pays à l’Intifada populaire du 17 décembre 2010.

La plupart des partis, anciens et quelques nouveaux, ne s’agitent que pour être « acceptés par l’Occident ». Les priorités et les revendications à court, moyen et long terme ont été écartées pour ne se préoccuper que de la place de l’islam dans la société, de la laïcité, de l’identité nationale, répondant ainsi aux forces idéologiques étrangères qui les portent et qui poussent à la division et la mise à la marge de la très grande majorité du peuple. L’élection de représentants à l’Assemblée Constituante le 23 Octobre 2011 pourrait alors clôturer l’entreprise de vol et d’avortement de la volonté du peuple pour son auto-détermination et sa souveraineté. Cette opération se réalise par un personnel politique, économique et intellectuel profondément impliqué avec le régime de Ben Ali et les partenaires tunisiens des lobbies étrangers. C’est grâce à ces démocrates, modernistes, progressistes et droits-de-l’hommistes, que le RCD va se trouver enfin légitimé par cette élection et remporter, peut être, la majorité des sièges à l’Assemblée. Leur haine du courant islamiste les pousse ainsi à trahir les aspirations du peuple. L’ennemi d’hier est devenu l’allié et l’ami d’aujourd’hui, contre le peuple.

Aux yeux des jeunes, et c’est tout à fait naturel, ce personnel politique n’a que des solutions opposées à leurs besoins sociaux et culturels d’aujourd’hui et de demain, il a fait son temps et il est caduque. Aux tunisiens immigrés, dont la plupart sont de condition économique et sociale modeste, plusieurs listes de partis politiques, et d’associations prétendument de « l’immigration » financées par les Etats et les fonds européens, comportent des candidats connus pour leurs nombreuses compromissions et d’autres pour être des fonctionnaires en exercice. Les immigrés doutent que ces candidats puissent sérieusement défendre les intérêts du peuple tunisien avant ceux de leur seconde patrie, notamment la France coloniale. Quelle confiance peuvent-ils avoir envers ceux qui appuient la politique d’ingérence étrangère dans les affaires du peuple tunisien et d’autres peuples arabes et quand ils se proclament « arabes en France et français en Tunisie » et qu’ils promeuvent le libéralisme économique à la DSK et BHL contre lequel la jeunesse tunisienne s’est révoltée. Aucune de ces listes n’est dirigée par un ouvrier immigré, un chômeur ou un retraité, comme si en France il n’y a que des intellectuels, des cadres, des universitaires et des professions libérales. Cela s’appelle du racisme économique, social et culturel. Le même racisme que la société française applique aux arabes, aux africains et aux musulmans des quartiers populaires. Les candidats et candidates de ces listes ne se placent nullement dans le sens de la volonté du peuple qui continue sa lutte pour la justice, la liberté, la dignité nationale et l’indépendance, contre les mensonges, les supercheries, les falsifications et les fausses solutions.

Le peuple sait qu’il est méprisé par cette classe d’arrivistes et de compromis avec les destouriens et les officines étrangères. Toute cette élite a bénéficié du système de corruption de ben Ali. C’est une des raisons pour laquelle il n’accepte pas une « réconciliation nationale » tant que les bourreaux et les criminels politiques et économiques sont toujours libres et détiennent encore les postes-clés dans toutes les entreprises nationales, les administrations et les ministères. La tromperie de la « démocratie » continue par le canal des médias et des moyens financiers douteux. Des chefs d’entreprise et des hommes d’affaires qui ont soutenu et financé auparavant Ben Ali et le RCD, financent aujourd’hui les partis qui étaient supposés « d’opposition démocrate et progressiste » ou « opposants laïcs ».

Quels que soient les résultats de l’élection à l’Assemblée Constituante, la configuration politique risque de perpétuer et d’approfondir encore plus le fossé entre la « nouvelle classe politique » et le peuple. Celle-ci n’hésitera pas, de par sa « légitimité » et sa « légalité » nouvelles, à réprimer toute velléité de contestation et de révolte populaire. La société tunisienne, comme les autres sociétés arabes, restera victime de la domination colonialiste et impérialiste aussi longtemps que ses élites n’auront pas cessé d’entretenir des rapports de dépendance idéologique, politique, culturelle, financière, etc …, avec l’Occident. Ces élites aliénées aux cultures judéo-chrétiennes et colonialistes sont promptes à exhiber Montesquieu, Jules Ferry, Marx, Lénine, Mao, Trotsky, Althusser, Bourdieu, Keynes, Friedman, Huttington, Brezinski ou Kissinger. Mais ils ne font jamais référence à ceux que leur peuple comprend tels Ibn Khaldoun, Abdelkrim El Khattabi, Frantz Fanon, Farhat Hached, Mehdi Ben Barka, Che Guevara, Ali Shariati, Mohamed Bakr Al Sadr, Ali Abderrazek, Abdelwaheb Al Messiri, Mounir Chafik, Hassan Nasrallah, Alain Badiou ou Enrique Dussel.

La libération nationale et sociale ne pourrait être atteinte que par une renaissance civilisationnelle de la société en conciliant une interprétation de la croyance et de la foi avec une pensée socio-politique moderne, loin de l’opposition abstraite de la raison et de la foi d’une part, et d’une religiosité de renonciation qu’elle soit superficielle, exclusive ou d’importation wahabite et sudaïri d’autre part. Comme le pouvoir politique allié à l’impérialisme et au colonialisme s’acharne à empêcher par tous les moyens cette renaissance, l’option révolutionnaire s’impose comme une nécessité politique, culturelle et économique. Les patriotes, les progressistes, les travailleurs, les défavorisés et tous ceux et toutes celles qui ont intérêt à la transformation de la société, n’ont qu’un seul choix, celui de se rassembler et continuer la lutte pour la réalisation des objectifs de l’Intifada afin d’établir la démocratie du peuple.

Le processus révolutionnaire sera long, avec des avancées et des reculs. Le peuple tunisien a montré à maintes reprises qu’il a assimilé et intégré la culture de résistance à sa vision de son propre projet de société. Il lui reste maintenant à construire son propre front politique débarrassé des idéologies et de modèles d’importation et des hypocrites. L’union des forces donnera les moyens d’imposer l’alternative politique véritable d’un nouveau mode de développement, d’une nouvelle constitution, d’une nouvelle république et d’une nouvelle administration épurée et assainie, en finir avec l’héritage politique colonial et avec l’Etat tunisien issu de la décolonisation de 1956 qui a reproduit jusqu’à nos jours les logiques coloniales de contrôle politique de la population, pour construire l’Etat civil et démocratique moderne. L’Intifada a annoncé une perspective de libération, d’autodétermination du peuple et de progrès humain. Elle replace l’être humain avec sa spiritualité au fondement de l’existence sociale et politique.

Jalila Klout

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Commentaires
B
On peut rêver à une bonne suite aux révolutions du printemps arabes, mais ce sont les forces en présence qui décident.<br /> Comme la gauche n'est pas prête à lancer des Brigades Internationales pour assurer un régime supportable et que la droite se satisfait toujours d'une dictature, peinte en rose ou brut de béton, les peuples arabes auront à la "jouer" serré avec les islamistes, comme en Turquie pour parler du moins mal, comme en Algérie pour envisager le pire, comme en Egypte pour le moins pire et comme en Syrie,en Libye,au Yemen,en Tunisie,là où personne ne sait RIEN des mois à venir.
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L
- L'idée que la vie spirituelle peut être compatible avec l'existence sociale et politique est antichrétienne. Elle est nitchéenne (morale pure), et se traduit en fait par une fuite dans le rêve. Tout l'effort de Marx consiste au contraire à montrer que la vie sociale et politique est fondée sur l'instinct, reprenant ainsi la thèse fameuse d'Aristote de l'homme, qui dans l'ordre des choses politique et morale, imite l'animal.<br /> - Ce serait la dernière des imbécillités d'inciter le monde arabe à répéter l'expérience soviétique ou nazie, les deux tentatives les plus sincères de restaurer la civilisation sur des bases populaires et spirituelles, hégéliennes pour le nazisme, léninistes pour les bolcheviks. Ce serait d'autant plus stupide que la révolution arabe ne peut s'appuyer sur un prolétariat uni et fort comme le prolétariat allemand ou russe.<br /> - L'idéologie suggérée ici porte la marque du totalitarisme, dont la ruse consiste précisément à élever l'ordre trivial, organique des choses, au niveau spirituel, quand l'humanisme depuis Homère jusqu'à Marx, consiste d'abord à penser CONTRE la vie sociale et politique. C'est un trait constant des régimes totalitaires ou tyranniques depuis l'Egypte en passant par Rome jusqu'à l'Allemagne nazie ou aux Etats-Unis de tenter de circonscrire l'art et la science au registre moral et politique, méprisables sur le plan spirituel. L'homme n'est pas seulement bestial ! S'il était tel, seulement un animal mortel en puissance, il n'y aurait pas d'art libérateur, mais seulement de la musique et des bibelots destinés à réconforter l'homme.<br /> - L'idéologie délétère présentée dans ce message revient à l'existentialisme, et l'existentialisme revient à la compétition, plus précisément à masquer aux opprimés cette règle d'or de la compétition qu'elle est la méthode pour assurer dans l'ordre social et politique le triomphe des élites et des clercs. BHL n'est pas pour rien le disciple de Sartre, prêcheur cynique en France de l'existentialisme aux ouvriers.
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A
Le peuple tunisien a à trouver les voies d'une politique d'émancipation dégagée de tout intégrisme politique (laïciste par exemple) ou religieux (application d'un "fiqh" -droit musulman - d'un autre temps), sans tutelle de qui que ce soit, sans ingérence (occidentale notamment par le biais de la fameuse et fumeuse "communauté internationale"), sans modèle préétabli (Sainte démocratie parlementaire par exemple), et personne ne peut imaginer que cela se fasse sans contradictions, sans efforts voire sans sacrifices. Tâchons d'être aux côtés de ceux qui agissent dans ce sens.
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B
La seule question à se poser est de savoir si le mouvement Ennahda qui risque de gagner les élections, respectera ou pas un fonctionnement laïc et démocratique de la société tunisienne. Son rapprochement avec le parti au pouvoir en Turquie est un gage de sécurité, mais ni les partis de gauche français, ni les intellectuels de gauche français, ni les syndicats français ne font le boulot d'approche indispensable avant de formuler le moindre avis sur le sujet - tout le reste est du baratin sans intérêt - NB: l'absence d'armée n'est pas un point rassurant, contrairement aux apparences...
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S
Il n’y a pas non plus d’ouvriers qui se présentent aux élections législatives en France. D’ailleurs, il en a toujours été ainsi, non pas en raison d’un racisme économique mais simplement parce que la plupart des ouvriers sont complexés et n’imaginent même pas pouvoir se présenter. Quand bien même ils se présenteraient, les autres ouvriers voteraient-ils pour eux ? Si Lula da Silva a été aussi populaire dans le monde, c’est que, justement, il faisait figure d’exception historique. <br /> La responsabilité et l’honneur de l’intellectuel et, d’une manière générale, du militant formé, c’est de représenter ceux de ses camarades qui ont du mal à s’exprimer. <br /> Il ne faut pas imaginer qu’un pays qui, il y a moins d’un an, vivait sous la coupe d’un autocrate va, au bout de quelques mois, offrir le visage d’une démocratie idéale et exemplaire avec des candidats issus du peuple, honnêtes, laïcs et capables de voter des lois pour faire de leur pays un État moderne. Il y aura des déceptions. Il y en a déjà. La démocratie ne se bâtit pas en neuf mois, surtout quand l’environnement n’est pas démocratique (c’est le moins qu’on puisse dire) et quand les pays riches, où travaille une partie de la population, connaissent une grave crise.
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