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11 mars 2012

Pour une gauche maquisarde

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http://www.lesarkophage.com/f/index.php

Éditorial du Hors série N°3 - Désobéir sous la gauche? (actuellement en kiosques)

Nous désobéissons depuis 2007 pour que Nicolas Sarkozy ne puisse jamais être réélu. Nous avons désobéi sous la droite et nous continuerons au besoin, mais nous désobéirons aussi sous la gauche. Nous désobéirons sous la gauche pour l’inciter à développer des politiques émancipatrices, nous désobéirons sous la gauche pour qu’elle retrouve les chemins des milieux populaires, nous désobéirons sous la gauche car rien ne sera jamais possible sans que le peuple ne fasse largement sécession par rapport au système économique et social dominant. Nous désobéirons sous la gauche car nous devons expérimenter mille alternatives, nous désobéirons sous la gauche pour qu’elle nous donne les moyens de changer la vie. Nous avons déjà des maires désobéissants, des parlementaires désobéissants… Pourquoi pas demain des ministres désobéissants, c’est-à-dire choisissant de se placer aux côtés de ceux qui rêvent un autre monde, de ceux qui multiplient les pas de côté, l’un après l’autre, jusqu’à l’ivresse. Nous sommes convaincus que rien de bonne se fera sans l’intervention citoyenne, nous attendons donc de la gauche qu’elle reconnaisse enfin aux individus et aux collectifs le droit d’expérimenter, de construire des alternatives en dehors des chemins balisés et cloutés. Nous espérons donc que sous la gauche nous pourrons désobéir dans de bien meilleures conditions. La gauche doit renouer avec son geste de 1981, qui avait permis, trop modestement certes, mais permis tout de même de développer la créativité populaire, l’expression démocratique (avec les lois Auroux sur les droits des salariés, la décentralisation, les radios libres, etc.). Nous désobéirons aussi sous la gauche car c’est la seule façon de rendre à la politique sa dimension vivante, d’en finir avec les politiques hors-sol, bref de faire renaître le peuple : les chemins de la désobéissance sont non seulement ceux de l’émancipation continue, mais ceux d’un surcroît de démocratie et donc d’un retour au politique des exclus de la parole. Désobéir, c’est rendre visible ce que le système rend invisible, c’est rendre audible ce que les médias rendent inaudible, c’est rendre sensible ce que le capitalisme insensibilise. Nous savons déjà que les logiques du système économique imposeront au gouvernement des poli- tiques antipopulaires, nous savons aussi que les gouvernants n’auront de cesse de vouloir faire rentrer les gens dans ce système, alors que ce n’est ni possible ni même souhaitable… Les exclus sont à leur place dans ce système. Il nous revient de les laisser s’auto-émanciper. Nous devons désobéir pour que la gauche soit capable de faire bouger les lignes, pour lui permettre de redevenir une gauche maquisarde, buissonnière, mais qui fasse cependant école. Nous devons désobéir pour prou- ver qu’il est possible de vivre mieux en refusant ce qui nous tue. Nous attendons beaucoup de la gauche puisque nous espérons qu’elle aura l’intelligence de rouvrir le champ des possibles, de permettre de nouvelles territorialisations du peuple. Nous sommes optimistes, malgré les dérives droitières des gauches, car nous ne partons pas de rien, mais des multiples formes de désobéissance déjà développées sous la droite… et la gauche. Nous savons pouvoir compter sur des forces poli- tiques, sociales, culturelles aptes à entendre et pourquoi pas à susciter de nouvelles désobéissances et de libérer de nouveaux terrains.
Nous en avons la preuve avec les communes qui refusent déjà d’être absorbées par d’autres, avec les arrêtés anti-expulsion, avec les parrainages républicains d’enfants sans-papiers, avec le refus du SMA (Service minimum d’accueil), avec la décision « illégale » de pavoiser des bâtiments publics avec le drapeau palestinien, avec l’instauration de la gratuité, etc. Nous en avons la preuve avec des formes de désobéissance qui sont en même temps des actes d’institutions comme l’inauguration de sa propre « chambre d’agriculture » par le collectif Démocratie pour le pays basque, comme l’exigence d’un statut de lanceurs d’alertes avec la fondation Sciences citoyennes, comme la volonté de réaliser des audits populaires des dettes publiques contre les injonctions des banques et des agences de notation. Poser des actes de désobéissance, c’est dire que l’insurrection des consciences ne suffit pas, que nous devons œuvrer à l’insurrection des existences, que nous devons frayer les chemins d’un socialisme à la fois antiproductiviste, anticapitaliste et amoureux du Bien Vivre. Poser des actes de désobéissance, c’est affirmer, face à un monde toujours plus complexe, que l’expertise des usagers vaut bien celle des spécialistes, c’est pourquoi nous disons, avec le Comité des Démocrates Déchaînés, qu’il nous faut désobéir pour davantage de démocratie. Nous devons entendre cette soif de démocratie dont ont témoigné le début des printemps arabes et les mouvements des Indignés, renouant avec l’exigence d’une démocratie réelle. Ce combat contre la démocratie fantôme doit permettre de reprendre la main politiquement, mais aussi socialement, culturellement, anthropologiquement en nous mettant en situation d’entendre le peuple ; de percevoir toutes les alternatives proto-éco-socialistes qui existent déjà, de voir que nous sommes déjà nombreux à vivre en dehors des contraintes du « toujours plus », en objecteurs de croissance, en amoureux du Bien Vivre, en adeptes d’une société postcroissance, d’une société post-extractiviste, postcapitaliste.
Notre désobéissance n’est donc pas le combat de la dernière chance. Ce n’est pas le choix désespéré de ceux qui se sauraient battus d’avance. Bien au contraire : la désobéissance, c’est la confiance dans la puissance des millions de gens ordinaires. Dès 1906, Gandhi évoquait ce choix : « Une nation de 350 millions de personnes n’a pas besoin du poignard de l’assassin, elle n’a pas besoin de la coupe de poison, elle n’a pas besoin de l’épée, de la lance ou de la balle de fusil. Elle a seulement besoin de vouloir ce qu’elle veut et d’être capable de dire “Non”, et cette nation apprend aujourd’hui à dire “Non”. » Un des slogans du RIB (Riposte contre les inégalités bancaires) n’est-il pas :« Ils ont le chiffre. Ayons le nombre »? Cette politique vivante est une façon de rompre avec certains schémas du passé qui opposaient l’avant-garde et la masse, le sérieux et la fête, le combat et la joie. La désobéissance, c’est refuser de remettre à plus tard ce qui peut être construit dès maintenant, c’est chanter au présent plutôt que d’attendre des lendemains qui chantent, c’est vouloir plus de démocratie politique, mais c’est savoir aussi que la démocratie réelle ne consiste pas seulement à mettre un bulletin de vote dans une urne. Désobéir sous la gauche, ce sera agir pour constituer une masse critique d’expériences, de petits bouts de socialisme gourmand, de socialisme de la décroissance, jusqu’à ce que notre révolution pacifique finisse par cristalliser. ■

Paul Ariés
aries

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Commentaires
A
Très touchée par ces propos, voilà ce qu'il nous faut dans un proche avenir afin de débloquer une fois pour toute tous ces clivages qui ne font que provoquer le malheur humain. Tout pour l'humain !
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L
- Ariès n'a pas trouvé la solution pour organiser la société autrement que sur le mode érotique/cupide. Marx ne dit pas que c'est possible, mais bien plutôt que l'organisation sociale n'est pas une voie salutaire (de fait, elle est macabre, et cet arrière-plan se retrouve dans tous les cultes sociaux).<br /> <br /> - Le "post-capitalisme" est une théorie fumeuse de marxistes-sociologues. Marx voyait plus loin que tous les pseudo sociologues post-marxistes. Engels et Marx ne sont pas des sociologues : dès lors que vous avez prouvé, comme Marx et Engels, que toutes les sociétés sont aussi atroces les unes que les autres, vous êtes bien sûr le plus dissuadé de poursuivre l'idéal sociologique, qui ne sera jamais qu'une vaine recherche du temps perdu.
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G
Union? Oui, et volonté farouche d'union, car foin des sectes impuissantes et querelleuses. Rassemblement des contraires : non. Et foin du "vote utile", illusoire, et du "soutien critique", compromettant et toujours foireux,aux pseudo-réformateurs. On n'inventera un autre avenir, cher Alain, qu'en toute indépendance d'esprit et de conduite (Marx)et sans s'infiltrer, en vain du reste, chez les autres, bref en ne répétant pas les expériences malheureuses d'un déjà long passé.
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A
Nous attendons beaucoup de la gauche. Ariès dixit. Et moi aussi. Nous attendons beaucoup parce que nous avons besoin de beaucoup et que nous avons beaucoup été trahis dans le passé. Ariès n'attendait rien de DSK, moi non plus. Il n'attend rien de Hollande, moi non plus. D'ailleurs quand Ariès dit "nous attendons" il veut sans doute dire: "voilà ce que la gauche devrait faire ", mais en fait il n'attend pas, il ne faut pas attendre, il faut agir dés maintenant. C'est ce que font ceux qui dans ce pays ont encore au moins des lambeaux de conscience de classe. Et dont Ariès fait assurément partie. Et moi aussi. Et toi aussi ami Guy. Agir ensemble. Créer les nouvelles communautés de travail et d'action. Inventer ensemble concrètement un avenir à visage humain. Chacun là où nous sommes. Et nous unir, nous unir, nous unir...
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B
"Nous attendons beaucoup de la gauche..." Le tonitruant DESOBEIR, c'est donc ça : (se) rabattre sur F. Hollande (hier sur DSK sans doute), soutenir blanc bonnet contre bonnet blanc. N'y aura-t-il jamais rien d'autre que cette alternative désespérante ?
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