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  • De Marx à Teilhard de Chardin, de la place pour (presque) tout le monde...
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8 avril 2012

L'auto-transformation des hommes

Chapitre 11 et dernier (intitulé "La pratique") du petit livre de Denis Collin illustré par Yves Rouvière  "Comprendre Marx et le capital", (100 pages, 9.90€)  Editeur Max Milo, 2011; pages 97 à 100:

   [...] Le capital, le travail, la valeur, etc...ne sont nullement des choses, mais l'expression théorique de rapports sociaux, c'est-à-dire de rapports noués entre des individus vivants. Les catégories économiques ne font rien, l'histoire ne fait rien. Seuls les individus agissent et ils n'agissent pas comme des marionettes manipulées par des structures qui les dépassent, ils agissent à partir de leurs propres déterminations, de leurs propres sentiments, de leur propre vision subjective de la réalité. Si on veut comprendre quelque chose à ce que Marx a tenté de penser, il faut toujours revenir là. On dit habituellement - c'est comme cela que l'on présente le marxisme et que les marxistes trés souvent se présentent eux-mêmes - que Marx est un matérialiste parce que pour lui l'économie déterminerait la vie sociale et la vie de l'esprit. Mais il n'en est rien. L'économie, pensée à travers les catégories de l'économie, n'est rien de spécialement matériel. Rien n'est moins matériel que l'argent. La "base matérielle", s'il faut parler ainsi, c'est l'activité pratique des individus qui agissent en relation avec d'autres individus et qui agissent d'abord pour continuer d'exister en tant qu'êtres vivants, ce qui suppose de se nourrir, de se vêtir, et quelques autres choses encore...

   Si on revient maintenant à notre histoire du capitalisme, on comprend du même coup qu'il ne peut pas disparaître de lui-même, victime de ses contradictions internes. L'évolution propre du mode de production capitaliste ouvre des possibles, mais n'assure nullement un dénouement nécessaire de cette histoire. Les possibles ne peuvent se réaliser que si la grande masse des individus en fait son objectif, le sens de ses actions. Les hommes font leur propre histoire, même si c'est dans des conditions qu'ils n'ont pas choisies. Mais cette histoire, ils ne la font pas à partir de plans préétablis, ni d'une "conscience théorique", qui feraient d'eux les agents conscients de la "nécessité historique". On peut congédier sans remords la providence ! On peut aussi renoncer une fois pour toutes au "grand soir". Aucun sauveur suprême (ni Dieu, ni César, ni tribun, dit la chanson), aucun de ces multiples chefs, petits ou grands, qui se prétendent les porte-parole du mouvement révolutionnaire, ne doit être attendu. Ni eschatologie, ni messianisme. Si le communisme est dans le mouvement réel, il est dans ceux qui, par l'action collective, se battent concrètement pour abolir la concurrence que les ouvriers se font pour vendre leur force de travail (ce que Marx appelle proprement le salariat). Le mouvement réel est dans ces associations partielles qui permettent à "ceux d'en bas de résister", dans ceux qui veulent échapper au carcan de l'entreprise capitaliste en explorant des voies alternatives, et dans toutes les initiatives concrètes pour organiser ici et maintenant la transformation sociale, dans les modes de production, dans la distribution, dans l'action culturelle.

   L'activité pratique par laquelle les hommes se transforment eux-mêmes, les Grecs appelaient cela praxis, un terme que Marx reprend à son compte. La pensée de Marx est donc bien une "philosophie de la praxis" et c'est cela la clé de son communisme si singulier.

Marx3D 72-120

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