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10 mai 2014

Questions de classe(s)

Notre espèce passe son temps à se tromper de colère. Le journal nous parle des affrontements en Ukraine, en Syrie, peut-être bientôt en Inde entre hindous et musulmans... l’homme est décidément un « mauvais voisin », pour reprendre la formule de Henri Michaux.

Sur notre terrain scolaire, une récente étude* confirme et précise les analyses concernant les discriminations ethno-raciales : les enfants issus de l’immigration, et essentiellement des immigration maghrébine, subsaharienne et turque, se sentent discriminés à l’école. Ce mal-être se traduit par l’accusation de racisme vis-à-vis des enseignants, et le mal-être rebondit à l’étage adulte.

…. POUR LES ELEVES COMME POUR NOUS...

Tout en considérant comme indispensables les travaux de recherche, nous nous situons sur ce site dans la recherche d’actions possibles. Comment dissiper le malentendu ? Comment expliquer aux élèves qu’ils sont orientés en fin de Troisième vers la voie professionnelle essentiellement parce qu’ils sont issus des milieux populaires, enfants ou petits enfants d’ouvriers peu qualifiés ? Que si leurs ascendants ont subi, les uns la colonisation, les autres le racisme, que si la discrimination à l’embauche et dans d’autres domaines de la vie sociale persiste, c’est l’inégalité sociale qu’ils subissent ? Que cela n’empêche pas qu’on peut comprendre qu’ils ressentent fortement une discrimination, que ce ressenti soit le nom qu’ils donnent à ce qu’ils subissent ?

Comment expliquer aux collègues pour qui c’est douloureux que ces élèves souvent dans le refus, apathique ou bruyant, réagissent ainsi parce qu’ils ne se sentent pas à leur place dans l’école des « autres », les autres étant l’agglomération vague des « bien nés » socialement ou ethniquement ?

…. S’Y RECONNAITRE ENTRE DISCRIMINATIONS REELLES, RESSENTIES, INEGALITES...

Ce n’est pas facile car le thème de l’inégalité est en train d’être remplacé par celui des discriminations. Non sans bonnes raisons : la discrimination, on peut la combattre secteur par secteur à l’aide de mesures juridiques ou pratiques (hommes-femmes, handicap), c’est un champ de lutte culturel au sens large (évolution des représentations dans le domaine ethno-racial), les recours individuels sont envisageables sur le terrain des tribunaux. Mais aussi avec ses limites : dans les classes populaires, on n’a pas besoin d’être discriminé pour subir l’inégalité. Souvent, on cumule inégalités (revenus, logement, santé, environnement) et une ou plusieurs discriminations (être une femme, un immigré etc).

…. UN DÉBAT ESSENTIEL

En tout cas, il faut en parler. S’expliquer toutes ces injustices (voilà le point commun), en parler entre nous, avec les parents, que les élèves puissent en parler. Je me souviens d’un grand silence quand, réagissant à l’interpellation d’un élève de Quatrième (« Monsieur, pourquoi il n’y a que des Noirs dans le bureau de la CPE ? » (élèves renvoyés de cours) j’ai dit que l’explication était sociale et pas raciale. Je me me souviens aussi de ce mot laissé parc un élève puis affiché en classe à la suite d’une discussion « moi jaurai pas eu onte d’être pauvre ». Inégalités, discriminations, mais quand on parle-t-on à l’école ? Quand ose-t-on en parler ? Quand en parlera-t-on enfin ?!

Car il est temps de passer du ressentiment, de l’incompréhension au débat, à l’argumentation, à la confrontation échangée avec le rel (social en l’occurrence). Des faux ennemis aux vrais adversaires.

* Parcours scolaires et sentiment d’injustice et de discrimination chez les descendants d’immigrés, Yaël Brinbaum et Jean-Luc Primon, INSEE, Economie et statistique n° 464 à 466, 2013.

cf. http://www.questionsdeclasses.org/?Afin-de-ne-pas-se-tromper-de

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Commentaires
H
La caractéristique du primate est l'exclusion. Il est normal que ce mouvement lui soit naturel. L'animal est toujours peureux devant ce qu'il ne connait pas. Quand nous dirons les hommes ont vocation à se libérer de la peur puisqu'ils se veulent humain, peut-être que cela deviendra une piste de réflexion féconde
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